«Et un, et deux, et trois degrés, c’est un crime contre l’humanité !» Il faisait étrangement chaud ce vendredi 13 octobre 2018 dans les rues de Genève. Comme si, pour marquer cette marche pour le climat, le ciel tenait lui aussi à se manifester. Scandés par des jeunes gens de Greenpeace qui menaient le bal, aussi déterminés que non violents, les slogans étaient repris par des milliers de manifestants, de tous âges, de tous milieux.
L’hiver 2019 n’aura pas refroidi cette prise de conscience collective. Bien au contraire ! Notamment en France, Allemagne, Belgique, Suisse et jusqu’en Australie, le mouvement de « grèves scolaires pour le climat » rassemble régulièrement dans la rue des dizaines de milliers de manifestants, collégiens, lycéens et étudiants, toujours plus nombreux. Ce mouvement rejoint désormais par l’ensemble de la population a été initié par l’adolescente suédoise Greta Thunberg, militante de l’environnement, qui s’est rendue fin janvier à Davos pour clamer à tous les membres du World Economic Forum : «Notre maison brûle et je veux que vous paniquiez!»
Face à l’effondrement de la biodiversité et au dérèglement climatique désormais largement perceptible – celui-ci aggravant celui-là – la tentation serait grande de sombrer dans le désespoir. A l’approche de l’inéluctable fin d’un monde, hypothèse moins insupportable que la fin du monde, à quoi bon dessiner un futur, à quoi bon lutter ? Le renoncement, c’est précisément ce que refuse la jeune génération.
Qui plus est, la lucide analyse des membres du conseil scientifique de Zoein que nous avons rencontrés ne nous conduit pas à une voie sans issue. Qu’ils soient climatologue, philosophe, biophysicien, économiste, juriste, agroforestier ou biologiste, ces femmes et ces hommes suggèrent un éventail de solutions car «il est encore temps d’éviter l’irréparable», comme le souligne Marie-Antoinette Mélières, physicienne climatologue.
Certes, la partie est loin d’être gagnée. «Systèmes économiques et juridiques, modes de vie, tout est à repenser», estime le philosophe Dominique Bourg. Il nous faut ni plus ni moins «inventer un futur différent» déclare le climatologue Hervé Le Treut. Mais si, comme le relève le biophysicien Jacques Dubochet, nous y mettons toute notre énergie «en luttant pour le climat comme le monde a lutté contre les nazis», nos enfants et petits-enfants n’auront pas à nous demander pourquoi, conscients du péril, nous n’avons rien fait pour éviter le pire. Jacques Dubochet est d’ailleurs en première ligne pour soutenir le mouvement des jeunes. «C’est leur affaire, leur vie, ils ne la laisseront à personne», écrit-il dans la presse suisse.
Treize témoignages, dans l’esprit de Zoein, nous invitent donc à passer de la parole aux actes, à prouver qu’un autre monde est possible, en nous inspirant notamment des lois de la nature vivante trop longtemps ignorées et bafouées. C’est seulement en apprenant enfin à les respecter que nous apprendrons à nous respecter nous-mêmes. Ici et maintenant.
Philippe Le Bé.